Au cœur du Kirghizistan

L'Oblasty de Naryn est la province la moins densément peuplée du Kirghizistan avec une densité de six habitants au kilomètre carré, traversée d'Est en Ouest par le fleuve Naryn qui lui donne son nom c'est une province profondément sauvage situé au centre du pays et dont le paysage est presque uniquement composé de hautes montagnes et de plateaux le plus souvent situés au-dessus de 2 000m d'altitude. C'est une province du pays toujours très marquée par le mode de vie ancien & nomade d'autant plus qu'elle est très mal desservie en terme de transports, les seules routes s'aventurant dans cette partie sauvage du pays sont très mal entretenues et très souvent impraticables l'hiver. L'Oblasty de Naryn est donc avant tout un pays encore peuplé par les éleveurs nomades qui suivent encore les enseignements et les coutumes millénaires du peuple kirghize.


Il rampait lentement, très lentement. Il tâchait de s'approcher doucement du groupe de chevaux sauvages qui paissaient à proximité de la rivière. Čoko ne souhaitait surtout pas éveiller leurs soupçons. Cette fois il avait décidé de monter l'un d'eux, et il y arriverait, beaucoup ne l'en pensaient pas capable à à peine treize ans et il avait décidé de leur prouver le contraire. Encore un mètre, puis un deuxième, il n'était plus très loin d'eux. Le cheval le plus proche était un bel animal à la robe isabelle qui continuait de se nourrir dans la plus grande quiétude. Čoko se voyait déjà chevauchant le fier animal et la tête de ses amis lorsqu'ils le verraient.
- Čoko ! Čoko !
Au loin un garçon du même âge que lui s'approchait en courant, Čoko reconnut Askar et tapa du poing sur le sol, rageur. En courant et en braillant dans tous les sens comme il le faisait les chevaux ne tarderaient pas à s'éloigner. Et c'est ce qu'ils firent presque immédiatement. Tous ses efforts furent réduits à néant en une poignée de secondes. Čoko se leva en courant vers son ami en hurlant un cri de guerre traditionnel nomade qu'il reprit aussitôt. Ils arrivèrent bientôt à proximité l'un de l'autre, s'observèrent un instant afin de déceler le point faible de l'adversaire puis se jetèrent l'un sur l'autre dans un simulacre de combat.
Aux environs de la rivière le sol était gorgé d'eau, aussi lorsqu'ils se relevèrent ils étaient tous les deux mouillés jusqu'aux os, mais ils riaient. L'épisode des chevaux était déjà oublié et ils profitèrent des derniers rayons de soleil du jour pour tenter de faire sécher en vain leurs vêtements. Mais tout à coup Askar sembla se rappeler de la raison de sa venue :
- C'est Nuržan qui m'a demandé de venir te chercher. Elle voulait que tu viennes pour l'aider à préparer le départ, nous devons partir dès demain pour le Lac Song-Kol, le tournoi équestre aura bientôt lieu.
Askar fixait les montagnes au loin mais avait des étoiles dans les yeux en parlant du tournoi équestre, pourtant Čoko haussa les épaules :
- Nous ne pourrons pas y participer avant l'année prochaine alors ça ne sert à rien.
Askar ignora le pessimisme de son ami et poursuivit :
- Tu crois qu'on pourra voir les chameaux et les monter cette année ?
- Si le vieux Kubanyčbek vient oui.
Ils discutèrent encore longtemps du tournoi équestre à venir qui comme chaque année rassemblerait encore de nombreuses tribus au bord du Lac Song-Kol avant de voir le soleil totalement disparaître derrière les montagnes. Ils commencèrent enfin à marcher pour rentrer chez eux afin que la tribu ne s'inquiète pas de leur absence.